Les Journées Techniques CEE (JT CEE) devaient avoir lieu initialement les 27 et 28 novembre 2025 et sont reportées à une date ultérieure encore méconnue. ROZO profite de ce décalage pour se replonger dans le dernier évènement organisé par l’ATEE, l’ADEME et la DGEC daté du 6 décembre 2023.

Il y a deux ans, beaucoup d’annonces ont été faites, et des évolutions devaient avoir lieu. Où en sommes-nous désormais ? Retour en arrière et analyse contextuelle de Maxime FRODEFOND, Responsable des affaires publiques chez ROZO, reprenant la présentation officielle de cette JT CEE 2023.

En décembre 2023 lors de cette journée technique, nous étions à la moitié de la 5ème période du dispositif CEE. A cette occasion, la DGEC annonçait que le volume de CEE délivré était de 1446,7 TWhc représentant 47 % de l’obligation totale. Beaucoup d’acteurs soulignaient que la marche était haute pour les deux dernières années et que les délais d’instruction du PNCEE étaient, malgré une tendance à la baisse, toujours importants ce qui pouvait influencer le niveau d’engagement.

Les évolutions de la réglementation sur la rénovation d’ampleur et la bascule progressive vers l’ANAH avait donné lieu aussi à des analyses pessimistes quant à la capacité des acteurs du dispositif CEE à mobiliser suffisamment de gisement.

Au crépuscule de la 5ème période et dans l’anticipation de la réconciliation administrative qui sera opérée au 1er trimestre 2026, l’obligation globale semble être en bonne voie avec 2873 TWhc délivrés ou en attente de délivrance soit 93% de l’obligation totale ( chiffres DGEC – lettre d’information octobre 2025) . Les différentes bonifications sur 2024 et 2025 ont accéléré la production de CEE sur ces deux dernières années permettant de clôturer la 5ème période au juste volume pour la majorité des Obligés du dispositif.

Cependant, à la différence de la fin de la 4ème période où un stock important avait été réalisé par les acteurs du dispositif en anticipation de la 5ème période, le début de la 6ème période ne donnera a priori pas lieu à un « stop & go » sur 2026 du fait d’un trop plein d’engagement. Les prix à terme et la dynamique des Obligés semble confirmer la volonté d’engager des opérations 6ème période dès le 1er janvier 2026

L’évolution des bonifications CEE en 2024 et 2025 a été assez dense. Entre suppression et créations de bonifications, le dispositif CEE est rentré dans une phase importante d’instabilité réglementaire. Lors de la présentation du 6 décembre 2023, la DGEC était restée dans une analyse réglementaire sans préciser d’évolutions majeures.

Mais deux après, ces principes précisés par l’article R221-18 du code de l’énergie fixant les modalités de pondérations ont modifiés par le décret 2025-1048 du 30 octobre 2025 relatif à la sixième période qui intègre désormais « l’objectif de maintenir un temps minimal de retour sur investissement ou un reste minimal à la charge des bénéficiaires ».

Cette nouvelle notion deviendra centrale et va engendrer une modification structurelle des bonifications afin de limiter les effets d’aubaine et les situations de surfinancement.

L’objectif affiché est de limiter l’emballement sur certaines opérations, empêcher la fraude et permettre une durabilité dans le temps plus importante des bonifications et ainsi offrir de la visibilité.

Le cap de 25% du volume total des CEE délivrés issus des bonifications est lui aussi modifié dans l’article R221-18 par une référence aux objectifs de l’article 8 de la Directive 2023/179 donnant une souplesse et une adaptation possible en cours de période en fonction du niveau d’atteinte des objectifs de la France

La simplification de la gouvernance du dispositif CEE était affichée lors des JT CEE de 2023 comme une évolution importante en 5ème période. Les chantiers de créations, révisions et suppressions de fiches se sont accélérés mais n’ont pas donné pleine et entière satisfaction.

La rapidité de suppressions et l’absence de concertation préalable sont les principaux griefs reprochés par les acteurs du dispositif qui relèvent une instabilité réglementaire accrue. Le cas du « 71ème arrêté » révèle la difficile adéquation entre anticipation et lutte contre les dérives reportées par la DGEC.

Le nouveau cadre prévu en 6ème période et notamment la modification du niveau de bonification de l’article R221-18 permettront théoriquement de répondre à ces critiques.

La 5ème période a été l’occasion de massifier les contrôles sur l’effectivité des travaux financés par les CEE. L’intensification du nombre de fiches avec contrôle a transformé en profondeur le niveau d’exigence attendu.

En effet, le PNCEE avait le 6 décembre 2023 présenté des chiffres qui marquaient un niveau important de dossiers incomplets au dépôt (39% des dossiers déposés depuis 2020), des taux d’insatisfaction élevés (60% de « non-satisfaisant » pour les contrôles ciblés sur les opérations de pompe à chaleur), une augmentation de 80% de signalement reçus par le PNCEE et une augmentation notable des sanctions d’annulation de CEE.

L’arsenal juridique à disposition de l’administration ainsi que les moyens techniques et humains semblaient alors ne pas être à la hauteur des enjeux.

L’adoption en 2025 de la loi dite « anti-fraude » ( Loi n° 2025-594 du 30 juin 2025 contre toutes les fraudes aux aides publiques) et l’accentuation des sanctions pécuniaires, l’annonce du renforcement des équipes du PNCEE à travers le PLF 2026, l’augmentation des croisements de données entre administrations et ministères ainsi que la mise en œuvre du Programme PRODICEE sont des réponses concrètes qui engageront l’ensemble des acteurs du dispositif vers un niveau d’exigence et de transparence sans précédent pour la 6ème période.

Lors la journée technique de 2023, la DGEC présentait une analyse partielle des 91 contributions reçues en présentant des tendances que nous pouvons désormais croiser avec les annonces et arbitrages désormais actés : 

  • Niveau d’ambition de P6 : sur ce premier point, le scénario qui était présenté par la DGEC a été largement revu à la baisse. Initialement, le 1er scénario bas était de 1250 TWhc/an d’obligation et le 2ème scénario haut était de 2500 TWhc/an. La DGEC proposait alors à travers la consultation un scénario « moyen » de 1600 TWhc/an. L’obligation retenue par le décret 6ème période ( Décret n° 2025-1048 du 30 octobre 2025 relatif à la sixième période du dispositif des certificats d’économies d’énergie) est de 1050 TWhc/an soit une baisse de 34% par rapport au chiffre initial présenté en 2023. Les objectifs de la Directive efficacité énergétique traduite à travers la Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPE) indiquait cependant une augmentation de l’ambition de réduction de consommation d’énergie à l’horizon 2030. Le graphique ci-dessous, présenté par la DGEC, modélisait l’ambition claire de la France avec un rôle central du dispositif CEE

JT CEE 2023 – ATEE, ADEME DGEC

Malgré ces obligations et cette trajectoire et même si le dispositif CEE jouera encore un rôle central dans le niveau d’atteinte des objectifs à 2030, d’autres moyens et leviers devront être mobilisés. Faute de quoi, la 6ème période devra-t-elle être réévaluée dès 2027-2028 ?

  • Obligation de résultat : au dernier COPIL CEE du 2 juillet 2025, l’obligation de résultat attachée au dispositif CEE a été présentée comme une évolution a. L’économie d’énergie théorique devra désormais être en phase avec l’économie d’énergie réelle mesurée. Les moyens et modalités restent à définir dans un prochain arrêté qui sortira avant fin décembre 2025 mais des croisements de données issus des compteurs d’énergie (Linky et Gazpar) ainsi que la mise en œuvre d’un méta-programme CEE d’évaluation du dispositif (PRODICEE) doté de 80 millions d’euros et porté par l’ADEME orientent aujourd’hui les CEE vers un outil de suivi, mesure et pilotage des économies d’énergie générées par les opérations d’efficacité énergétique. L’obligation de reporting préalable des opérations est aussi une mesure structurelle très importante qui doit être encore détaillée.
  • Bonifications pour la sixième période : sur ce point, l’arrêté 6ème période a donné une partie des réponses mais une doctrine bonification est encore en attente de publication avant la fin d’année 2025. Les bonifications resteront encore fortement mobilisées mais avec des règles qui, comme nous l’avons déjà précisé, limiteront les effets d’aubaine.
  • Réconciliation à mi-parcours : sur ce point, peu de détails ont été présentés même si la mise en œuvre parait nécessaire pour une période CEE qui passe désormais à 5 années (2026-2030).
  • Assiette de l’obligation : elle reste inchangée par rapport aux périodes précédentes. En effet, les consommations industrielles ne rentrent pas dans l’assiette. La répartition de l’obligation est cependant modifiée avec un renforcement pour les énergies fossiles.
  • Seuils de franchise : les seuils de franchises « carburant » ont été diminués pour limiter les effets de non-assujettissement de certains acteurs et la concurrence déloyale qui pouvait en découler. Sur ce point, la consultation du décret 6P et sa version définitive ont légèrement été amendés mais la logique d’une baisse progressive des seuils de franchise pour chaque période a été confirmée.
  • Composante carbone dans l’obligation : l’évolution à la hausse de la répartition de l’obligation pour les énergies fossiles reste encore la traduction indirecte d’une composante carbone dans le dispositif CEE. Il n’existe cependant pas de valeur CO2 directe explicite fixée dans la réglementation sachant que l’application de l’ETS-2 reste politiquement, au niveau européen, en suspens.
  • Contrôle du marché secondaire : le contrôle du marché secondaire va être renforcé par une évolution de l’article L.221-7 du code de l’énergie. Initialement prévue dans le décret 6ème période, cette disposition relèvera d’un décret simple.

2 années après la dernière journée technique CEE et les annonces sur l’évolution de la 6ème période, nous constatons que la majorité des évolutions envisagées ont été retenues ce qui confirme un consensus général sur les fondamentaux de l’organisation du dispositif CEE. Sur les 91 contributions à la consultation 5P-6P 2023 ainsi que les 41 contributions sur le décret 6ème période, nous constatons que l’écosystème des acteurs CEE pousse vers une augmentation de la transparence et de la stabilité pour que toutes les opérations financées remplissent leur objectif premier : améliorer la performance énergétique de notre système global et ainsi directement diminuer les consommations d’énergie de tous les secteurs.

Les doctrines programmes et bonifications, l’arrêté modalités sont les derniers textes désormais attendus pour fixer et détailler les grandes orientations prises par le décret 6P, la loi « anti-fraude » et les annonces successives de la DGEC.

Malgré l’annulation des journées techniques des 27 et 28 décembre 2025, l’ADEME a communiqué sur deux évènements à venir :

  • Webinaire organisé par la DGEC le 2 décembre à 14h30 qui sera l’occasion notamment d’annoncer le détail des textes restant avant le lancement de la 6ème période la 1er janvier 2026
  • Une journée CEE organisée par l’ATEE début 2026 (date à confirmer) et qui sera l’occasion de reprendre une partie des interventions prévues.

ROZO sera présent à ces deux rendez-vous pour partager son expertise sur le dispositif CEE, décrypter les évolutions réglementaires et accompagner les acteurs dans la compréhension des enjeux de la 6ᵉ période.

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